L'abomination de Bugarach....

Bon ça y est, depuis le temps qu'on en parlait, l'expédition est arrivée c'est ...

Bugarach? Mais qui est-ce donc, demande le mal-informé quidam. Ne sais-tu pas, cancre des nouvelles télévisuelles, que selon d'inventifs allumés s'appuyant sur Nostradamus et quelques lectures mal digérées de légendes mayas, cette année n'est rien de moins que la fin du monde? Ne sais-tu pas non plus qu'un seul lieu, un seul sera épargné par cette catastrophe si anciennement annoncée? Et bien figure-toi que ce ce lieu n'est autre que Bugarach, paisible petit village Audois qui, s'il n'en était pas déjà soupçonné d'héberger quelques soucoupes volantes, le tombeau du Christ, ou de sa nombreuse fratrie, n'en était pas moins calme et tranquille et n'espérait certainement pas être le dernier village du monde.

Bref, depuis cette découverte, les basquets me démangeaient d'aller rendre visite aux quelques urluberlus peuplant ce lieu et dont l'arrivée potentiellement massive autour de la date fatidique du 21 décembre 2012 inquiète quelque peu le maire. D'autres compères, également titillés par la possibilité d'être converti au Bugarachismes tentions vainement depuis quelques temps de trouver le moment idoine pour une telle entreprise qui se concrétisât donc fortuitement ce week end.

Lorsque Gilles m'a proposé vendredi soit cette expédition accompagné de son collègue de travail, Laurent, l'affaire était conclue, et nous voilà partis samedi matin à l'aube naissante (bien que le décalage horaire ait sournoisement placé l'aube vers 11h du mat).

Pour aller droit au but, une concertation des 3 bougres nous amenât à prévoir un plan éclair à la mesure de l'urgence de la situation. N'écoutant que notre courage, et malgré la présence probable d'hommes-lézard, nous faisons route vers Espezel où la rumeur de la présence d'hommes lézards pourrait être un premier indice.

Chemin faisant, nous passons par Limoux, où nous trouvons une piste: sur le bord du chemin, se trouve une étrange création, probablement un message des indigènes au terrible Chtutlu qui ne communique avec les terriens qu'à travers ces artéfacts hautement paranormaux que les experts nomment Kanapoutz.

Mais nos tentatives de déchiffrage restent vaines. Probablement à cause de l'absence de magnétomètre à proton, indispensable dans de tels cas, le sens caché des messages nous échappe...




Pénétrés par l'évidence du mystère qui s'épaissit à nos alentours, nous reprenons notre route en direction des hommes-lézards. Arrivés à Espezel, nous tombons par le plus grand des hasards sur un repère des séides de Nyarlathotep: le Relais du pays de Sault. Il est probable que cette auberge d'apparence anodine, utilise la réputation gastronomique de ce recoin du monde pour faire ingérer aux innocents aborigènes et visiteurs leurs mixtures venues d'Arkham.

Toujours mus par notre indicible volonté nous pénétrons cette antre mal famée. A peine assis, nous remarquons la présence sur la table d'une bouteille d'un apéritif maison et d'un bol rempli de fritons de canards d'une taille et d'un aspect effrayant de tentation, que le goût ne fit que confirmer.
La présence de ces mets sur la table avant même que nous ayons commandé n'est évidemment pas naturelle, seuls ces monstres peuvent envisager un tel stratagème.
C'est à ce moment là qu'arrive la serveuse qui, au lieu de l'habituel "que prendrez vous", pose sans un mot sur notre table non pas un menu, mais une assiette de charcuterie suffisante pour nous nourrir à tous les 3, surtout accompagné par une salade de gésiers que-je-ne-te-dis-que-ça. Nos amulettes sacrées étant supposé nous protéger de nombreux maléfices, nous goutons tout. Boudin, pâté, jambon, saucisson, salade de gésier et fritons n'ont plus de secret pour nous. Le gout est à notre palais ce que le chant des sirènes était à Ulysse: hypnotique et surnaturel, ça sent le piège et le canard à plein nez!



Lors qu’enfin la prétendue serveuse cède à la farce et nous amène un menu, nous manquons de nous étouffer tant l'illusion est grossière et le boudin fantastique. L'entrée, l'apéritif, le vin à volonté, le fromage, le dessert ET le café, tout est inclus. Impossible, nous savons bien qu'aucun négoce ne survirait à un tel gaspillage, or le restaurant est plein. Nous commençons à soupçonner quelque artifice démoniaque...

Après avoir choisi un pavé de biche et une daube présentée comme la spécialité de la maison, nous devons nous rendre à l'évidence, toute notre bonne volonté ne suffira pas à achever ces entrées si elles sont suivies de tout le reste du repas. Dépités d'avoir perdu cette bataille, nous attendons la suite de mâchoire ferme et d'estomac déterminé.

C'est un désastre : plat, fromage et dessert sont gargantuesques et divins, le nectar qui les accompagne n'en finit pas couler à flot (sauf Gilles qui est sous l'effet du sortilège de conduite). Rien à faire nous n'y arriverons pas. Narquois, le patron du dit lieu vient en personne nous déposer une bouteille de vin de plus sur la table. Son rictus est effrayant, et nous pressentons qu'il pourrait s'abreuver de notre sang si on le laissait faire.
D'ailleurs, que boit-il sur l'illustration démoniaque de sa carte de visite?


Commençant à remarquer que les tables adjacentes commencent à délirer sous l'effet des diverses substances cachées dans ces mets. Profitant que le café est terminé, et bien qu'affaiblis par ces joutes, nous arrivons tout juste à nous échapper sur 2 pattes.

L'air frais de la montagne nous restitue quelques bribes de sens commun, et nous repensons à cet épais mystère: par quel trésor maléfique arrivent-ils à distribuer ainsi tous ces produits sans se ruiner? Un trésor... Mais c'est bien sûr! Nous sommes à deux pas de Rennes-Le-Château, serait-ce le trésor de l'abbé Saunière qui alimente ce lieu de débauche culinaire? Un seul moyen de s'en assurer, passer par Rennes-Le-Château avant de nous risquer à Bugarach.

Comme tous les alchimistes dignes de ce nom, j'avais déjà visité la capitale de l'ésotérisme. Grace à de profondes connaissance des secrets maçoniques et kabbalistiques j'avais à l'époque trouvé et laissé en place le trésor tant recherché à l'entrée de l'église à droite, dans la tirelire en bois "Le trésor c'est vous". Trésor qui devait donc toujours s'y trouver.
Et bien DAMNED! La boîte sacrée en bois avait été maladroitement remplacée par une vulgaire caisse métallique sans les incantations de rigeur: c'est bien le trésor dérobé de l'Abbé Saunière qui alimente donc les hommes-lézards dans leur infect négoce!

Forts de ces découvertes, mais quelque peu hésitants devant la couleur de sang de la lune gibbeuse (toujours ce maudit décallage horaire, il était presque 17 heure), nous nous mîmes en route pour Bugarach. Mîmes ça faisait un bail que je voulais le placer.

Comme il se doit, la dent de Bugarach (dent c'est toujours mieux que pic pour l'ambiance) était couverte de brume.

Entre l'heure et le fait qu'on était équipé plutôt pour la cueillette de paquerette que pour la rando, l'ascension s'est limité à 10 minutes de promenade, en se faisant doubler par un Danois qui comptait bien dormir là haut (certainement possédé le type pour venir de si loin).

Du coup, on se dit qu'il est plus raisonnable de chasser l'urluberlu du côté du village que dans ces inhospitalières montagnes. Le village faisant à peu près 2 rues et demi, on trouve assez vite le seul endroit qui ait une terrasse pour y boire un coup. Nous entrons et afin de sympatiser aec l'aborigène, après un cordial salut Laurent lance à la tenancière une blague sur les communautés d'illuminés qui ne manquent pas de peupler les environs. Bizarrement, la sympathiuque entrée en matière tombe à l'eau. C'est à ce moment là que nous nous redons compte que le bistrot est couvert d'affiches sur la thérapie quantique, les mystères de Bugarach et autres pyramides pleines de cranes de cristal et de mystères.

Là, on sent bien que si on reste trop longtemps, on va nous cuisiner à la sauce hommes-lézard. On enfile notre jus de fruit et on se tire.

Il faudra vraiment qu'on revienne visiter le pic, où doivent se trouver les mystérieuses communautés.

A suivre...